Ségolène Royal relance le débat sur la préférence régionale

Par Florent Corée
En déplacement en Martinique et en Guadeloupe, la candidate socialiste a réaffirmé sa volonté de privilégier l’emploi local dans les départements d’outre-mer. Une proposition qui pourrait se heurter à des obstacles institutionnels.
"Je demande aux employeurs de favoriser le recrutement local (...) et j’étudierai, pour ma part, la façon de régionaliser les concours administratifs. Cela me semble moral et tout à fait acceptable". En déplacement aux Antilles la semaine dernière, Ségolène Royal s’est de nouveau prononcée en faveur de la préférence régionale, reprenant une proposition qu’elle avait faite lors de son voyage à la Réunion en octobre 2006. Devant les militants venus l’acclamer en Guadeloupe, la candidate socialiste a réaffirmé sa volonté de favoriser l’emploi local dans les collectivités d’outre-mer, soulignant que si elle était élue, son gouvernement donnerait un nouveau coup d’accélérateur aux réformes sociales engagées par la gauche depuis 1981. Ces déclarations étaient attendues. Elles tiennent compte des revendications de plus en plus pressantes exprimées aussi bien aux Antilles qu’à la Réunion par une partie de la classe politique et certains milieux économiques. Dans son projet final, le Parti socialiste ne va pas aussi loin dans ses orientations. Le PS préfère mettre l’accent sur des accords de partenariat qui seront passés avec des établissements d’enseignement supérieur afin d’accélérer l’accès des jeunes ultramarins aux carrières administratives. Mais cette position officielle n’est pas partagée par la commission Outre-mer présidée par le député guadeloupéen Victorin Lunel. Interlocuteur privilégié de Ségolène Royal tout au long de son séjour, le parlementaire antillais n’a cessé de lui rappeler cet enjeu électoral, et défendu la thèse selon laquelle il fallait préparer, dès maintenant, "les ultramarins à prendre en main le développement de leur région". Une analyse valable aussi bien pour le public que le privé. La candidate socialiste affinera sans doute ses propositions d’ici le 11 février, date à laquelle elle devrait rendre public son programme. Sur cette question, au moins, Ségolène Royal ne risque pas se se retrouver en porte-à-faux. Même s’il a dénoncé lundi dans le journal Le Monde les accents électoralistes du PS, le député Éric Raoult n’a pas exclu, lui non plus, d’éventuelles adaptations....... Disposition spécifique en Nouvelle-Calédonie Reste que cet apparent consensus national ne règle pas toutes les interrogations inhérentes à ce type de mesure. Selon Le Monde, la promesse de Ségolène Royal de "régionaliser les concours administratifs" risque de se heurter à des obstacles de nature institutionnelle. La question n’est, en effet, pas nouvelle. Elle a par exemple fait l’objet de discussions intenses lors de la signature de l’accord de Nouméa en 1998. Pour intégrer la règle de la préférence locale dans les textes, il a fallu introduire une disposition dans la loi organique du 19 mars 1999 sur la Nouvelle-Calédonie, disposition fondée sur la notion de "citoyenneté calédonienne", un concept inexistant dans les DOM. Cette loi prévoit que le territoire d’Outre-mer peut prendre des mesures destinées à promouvoir l’emploi local "au bénéfice des citoyens de Nouvelle-Calédonie et des personnes qui justifient d’une durée suffisante de résidence". Juridiquement, la porte n’est toutefois pas totalement fermée. En Nouvelle-Calédonie, le Conseil d’État a préconisé la création de deux concours pour les emplois publics territoriaux, l’un réservé aux Calédoniens, l’autre aux métropolitains. Dans les départements d’Outre-mer, la réforme pourrait selon ses partisans être progressive et limitée à certaines administrations comme l’Education nationale ou les Finances. A droite, comme à gauche, on estime que le juge constitutionnel ne devrait pas s’opposer à une telle expérimentation.Source: http://www.clicanoo.com/article.php3?id_article=148027